Démarrage d'une simulation climatique

Les modèles physiques de climat tout comme les modèles de prévision météorologiques sont basés sur les équations de la mécanique des fluides traduites dans un code informatique.  

Afin de produire une simulation qui fera évoluer les diverses variables climatiques dans le temps, ces modèles doivent connaître les caractéristiques de la surface terrestre et la composition de l'atmosphère de même que la valeur initiale (au temps "zéro" du modèle) des différentes variables telles que le contenu en eau dans le sol, le couvert de neige au sol, la température de l'air et les vents. C'est ce que l'on appelle l'initialisation du modèle.

Contrairement aux modèles de prévision météorologiques, les modèles climatiques ne sont généralement pas initialisés à l'aide d'observations.

Dans le but de mieux comprendre cette caractéristique importante, il est utile de les comparer plus en détail à leurs cousins les modèles de prévisions météorologiques.

 

Afin de prédire avec la plus grande précision possible les évènements météorologiques pour les quelques jours à venir, les modèles de prévisions météorologiques ont besoin d’être initialisés avec un portrait très fidèle de l’atmosphère observé (et même de l’océan) que l’on appelle analyse . L’analyse fournit des valeurs initiales qui permettront aux équations de la mécanique des fluides de prédire la séquence réelle des évènements météorologiques pour quelques jours. Au-delà de ce délai, l'aspect "prédictif" du modèle n’est plus possible dû à l’effet combiné de la nature chaotique des équations et des imprécisions provenant à la fois des observations et du modèle.

C'est pour cette raison, qu'un modèle climatique, qui excède largement ce délai de quelques jours lorsqu'il est utilisé pour simuler le passé récent – ou dit moderne- sur plusieurs décennies (p. ex. la période 1960-2014 choisie pour CORDEX-CMIP6 ), ne peut pas reproduire la séquence exacte des évènements météorologiques observés. On s’attend par contre à ce que les divers moments statistiques des variables climatiques simulées par le modèle soient semblables à celles tirées du climat observé. On ne parle plus alors de prévision mais plutôt de simulation climatique. Pour produire une telle simulation, le modèle de climat n’a pas besoin de connaître avec exactitude l'état de l'atmosphère et de l'océan au temps initial. Cela fait en sorte qu'il n'est pas nécessaire de le démarrer avec des observations.

 

Vu que les équations du modèle de climat requièrent tout de même des valeurs initiales,
qu’utilise-t-on alors pour démarrer une simulation climatique?

 

Bien que ce ne soit pas nécessaire, on peut quand même utiliser des observations, mais des valeurs très différentes, comme par exemple des valeurs nulles ou encore des valeurs moyennes issues d’une autre simulation climatique, font tout aussi bien l’affaire. Toutes ces alternatives produisent essentiellement le même climat.

Une fois que les informations sur la surface terrestre et sur la composition de son atmosphère sont fournies au modèle climatique et que des valeurs initiales sont assignées aux différentes variables, le modèle commence les calculs destinés à produire une séquence de conditions météorologiques virtuelles qui s'étendent sur plusieurs décennies. L'examen de ces séries temporelles, révèle que le modèle de climat met un "certain temps" (il est question ici de temps modèle et non pas de temps réel) pour arriver graduellement à produire des valeurs semblables à celles que l’on pourrait retrouver dans la réalité.

Cette période de transition s’appelle le temps de relaxation vers l’équilibre (« spinup » en anglais). Elle est typiquement de quelques jours pour l’atmosphère, tandis qu’elle peut atteindre plusieurs années pour le sol et même plusieurs centaines (milliers) d’années pour l’océan et certaines parties de la cryosphère. Lorsque cette période de transition est terminée, les diverses statistiques de la simulation climatique se stabilisent. Le modèle a alors atteint son propre équilibre et son propre climat.

Si on refaisait l’exercice avec d’autres valeurs initiales, on remarquerait qu’une fois le temps de relaxation vers l’équilibre complété, la simulation serait différente mais convergerait à peu de choses près vers le même climat. Pour de longues simulations, le choix des valeurs initiales n’a donc presque pas d’impact sur les résultats du modèle climatique.

Par contre, l'usage de valeurs initiales réalistes est avantageux car il permet de réduire considérablement, sans l’éliminer, le temps de relaxation en initialisant le modèle le plus près possible de son état d’équilibre. Cela peut être fait aussi bien avec des valeurs climatologiques observées que simulées. C'est une façon d'augmenter substantiellement la portion « utile » de la simulation climatique et de réduire considérablement le temps de calcul car les données simulées faisant partie du temps de relaxation vers l'équilibre sont toujours retranchées lors de l'analyse des résultats d'une simulation.

Notion avancée

La prédictibilité de l'océan peut s'étendre sur quelques années comparativement à quelques jours pour l'atmosphère. C'est ce que cherche à exploiter un tout nouvel axe de recherche appelé "la prévision décennale". Afin de prédire certaines variables climatiques fortement influencées par l'océan sur plusieurs années, un modèle climatique serait initialisé avec des observations très précises de l'atmosphère, de la surface de l'océan et même de l'océan profond. On peut voir la prévision décennale comme un hybride entre la prévision météorologique et la simulation climatique. Les prévisions décennales sont encore à l'état expérimental.

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