Élaboration du portrait bioclimatique futur du Nunavik

Les perturbations climatiques actuelles au Nunavik sont importantes et risquent d’être encore plus intenses d’ici la fin du siècle, ce qui aura notamment des conséquences sur sa faune et la végétation, mais également les infrastructures et les populations qui y vivent.

Le territoire nordique québécois présente toutefois quelques défis spécifiques lorsqu’on souhaite caractériser son climat, notamment à cause de la vaste étendue du territoire, de la très faible densité de stations d’observations météorologiques et hydrologiques et de l’influence côtière causée par sa localisation géographique.

Ces défis se répercutent évidemment sur les analyses du bioclimat et de l’hydroclimat. Il est donc primordial d’apporter une attention particulière aux différents produits climatiques disponibles pour ce territoire afin de développer des scénarios climatiques futurs de qualité et adaptés aux besoins des décideurs locaux.

Photo: B. Tremblay

• Mettre à jour le portrait climatique récent et futur du Nunavik ainsi que ses sous-composantes hydroclimatiques et bioclimatiques;

• Réaliser une analyse d’impact des changements climatiques sur la végétation et la grande faune.

• Analyse des jeux de données alternatives disponibles pour caractériser le climat de référence et sélection du plus approprié; Acquisition et analyse des simulations climatiques régionales disponibles sur le territoire;

• Calcul d’indicateurs climatiques prioritaires sur les jeux de données de référence et futurs;

• Calcul des bioclimats récents et futurs avec la méthode Litynski;

• Validation et documentation d’indicateurs hydrologiques disponibles dans le projet cQ2;

• Cartographie et montage d’un atlas incluant tous les éléments climatiques, bioclimatiques et hydrologiques étudiés;

• Évaluation des patrons d’évolution de la végétation selon les scénarios climatiques futurs;

• Modélisation de la répartition actuelle et potentielle future du caribou migrateur, de l’ours noir et du loup gris

Les travaux réalisés confirment que le Nunavik connaitra des bouleversements majeurs en matière de climat au cours des prochaines décennies. On assistera globalement à un réchauffement important aux horizons 2046-2060 et 2076-2100, ce qui se traduira par une modification majeure de plusieurs indicateurs liés aux températures. De même, les précipitations annuelles augmenteront sur l’ensemble du territoire avec des augmentations plus marquées pendant les mois d’automne et d’hiver.

La couverture de neige diminuera de façon globale, entrainant une réduction de la durée du couvert de neige et de son épaisseur maximale. Pour ce qui est de l’hydrologie, il est très probable que le débit annuel moyen et le débit moyen de crue augmenteront dans le futur, et ce, pour tous les bassins versants à l’étude.

En plus du rapport final, un total de 81 indicateurs climatiques (tableau 1), aux échelles annuelles et mensuelles, ont été définis et classés en trois groupes: les indicateurs associés aux températures (32 indicateurs), aux précipitations (19 indicateurs) et aux précipitations sous forme solide et au couvert de neige (30 indicateurs). À titre d’exemple, la figure 1 ci-dessous présente les résultats obtenus pour la longueur de la saison de croissance sur la période 1980-2004 ainsi que les scénarios futurs médian, supérieur et inférieur sur l’horizon 2076-2100 (RCP 8.5).

Cet indicateur connaîtra vraisemblablement un changement important, la moyenne régionale passant de 117 jours au début du siècle à 177 jours à la fin du siècle. Les fourchettes inférieures et supérieures indiquent un fort consensus quant à la direction du changement, puisque la durée augmente, quelle que soient les simulations considérées, sur l’ensemble du territoire.

La saison de croissance, combinée à la température et à la précipitation moyenne annuelle, ont servi de base au calcul des classes bioclimatiques du Nunavik, selon la méthode de classification climatique mondiale de Litynski.

Figure 1: Longueur de la saison de croissance sur la période 1980-2004 ainsi que les scénarios futurs médian, supérieur et inférieur sur l’horizon 2076-2100 (RCP 8.5)

Les résultats, pour l’horizon 2076-2100 (RCP 8.5) suggèrent des modifications majeures du bioclimat de la région. En effet, les principaux constats laissent présager l’apparition de certaines classes, telles que «Température subpolaire» (extrêmement probable), «Température subpolaire douce» (probable) et «Saison de croissance longue» (extrêmement probable). À l’opposé, d’autres classes, pourraient quant à elles disparaître, telles que «Température polaire» (probable) et «Précipitation semi-aride» (extrêmement probable).

Concernant l’évolution de la végétation, il apparaît peu probable qu’on assiste à une remontée significative de la limite latitudinale des arbres d’ici 2100. C’est probablement plus au sud, au niveau des limites des arbres altitudinales de la toundra forestière, que se produiront les réponses les plus fortes. Dans le domaine de la toundra arctique, la principale réponse des changements climatiques sera une expansion majeure de la superficie occupée par les arbustes érigés au détriment de celles occupées par la toundra à arbustes rampants.

Finalement, l’enveloppe des conditions climatiques favorables au caribou migrateur du Troupeau de la rivière aux feuilles devrait diminuer au cours du 21e siècle, et ce, pour toutes les saisons. Bien que ceci ne se traduise pas nécessairement par une diminution réelle de l’aire de répartition du troupeau, il suggère que les changements climatiques prévus induiront une pression négative sur les individus de ce troupeau.

Tableau 1: Liste des indicateurs disponibles pour le climat de référence et les périodes futures 2040-2064 et 2076-2100 selon les scénarios RCP 4.5 et RCP 8.5.

• Centre d’études nordiques/Arcticnet

• Consultants privés

• Ministère de la Forêt, de la Faune et des Parcs (MFFP)

• Université du Québec à Rimouski