Impacts des changements climatiques et mesures d’adaptation contre les ravageurs présents et potentiels en grandes cultures au Québec
Les outils de planification et d’action des décideurs bénéficieront des connaissances issues de ce projet, favorisant ainsi l'adaptation du secteur de la phytoprotection aux changements climatiques. Les résultats obtenus permettront également aux clubs d'encadrement technique de planifier l'adaptation progressive de leurs services aux producteurs.
Détails du projet
Responsable(s) scientifique(s)
Contexte
Les changements climatiques auront des impacts sur la production agricole québécoise. L'augmentation des températures moyennes et des cumuls de degrés jours seront favorables au développement de certaines cultures, mais ils favoriseront aussi les ravageurs existants et les espèces exotiques envahissantes.
Les grandes cultures (maïs, soya, blé, canola) couvrent plus d’un million d'hectares au Québec et représentent un apport très important au niveau économique. Il est donc primordial d’évaluer les problèmes phytosanitaires potentiels de ces cultures en lien avec l'évolution attendue du climat.
Objectif(s)
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Identifier les principales espèces d'insectes et maladies des grandes cultures qui seront affectées par les changements climatiques parmi celles déjà présentes au Québec ou pouvant potentiellement s'y établir;
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Évaluer les impacts des changements climatiques sur l'aire de distribution, le développement phénologique ou la capacité d'établissement d’espèces ciblées ainsi que sur les dommages aux cultures;
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Identifier les mesures d'adaptation possibles pour les espèces ciblées, et plus globalement pour la protection des grandes cultures.
Démarche
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Revue de littérature sur les espèces d’insectes et de maladies qui représentent un risque pour les grandes cultures en lien avec l'évolution attendue du climat;
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Choix de cinq espèces parmi les espèces identifiées à l'étape précédente suite à une consultation d'experts en phytoprotection;
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Développement et utilisation de modèles bioclimatiques pour évaluer les impacts des changements climatiques sur l'aire de distribution, le développement phénologique, la capacité d'établissement des espèces ciblées et les dommages aux cultures à l'horizon 2041-2070;
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Analyse de la situation des espèces ciblées dans des régions du monde actuellement soumises à un climat analogue à celui projeté pour le Québec à l'horizon 2041-2070 afin de valider certains impacts et identifier des mesures d'adaptation.
Résultats
Le projet a permis d’identifier 230 insectes ravageurs et 267 maladies, dont 26 nématodes, qui affectent les grandes cultures (soya, maïs, blé, orge, avoine et canola). Parmi ceux-ci, 14 espèces déjà présentes au Québec ainsi que 24 espèces exotiques pourraient être affectées par les changements climatiques attendus au Québec et ont fait l’objet d’une revue de littérature détaillée.
Douze fiches synthèse ont été réalisées pour les espèces exotiques ayant le plus de chance de s’établir au Québec dans le futur. Ces documents ont été mis à la disposition des conseillers et producteurs agricoles sur le site Agri-Réseau.
Trois insectes (Punaise marbrée, Noctuelle de la tomate et Punaise verte ponctuée) ont fait l’objet d’une analyse détaillée pour modéliser les impacts des changements climatiques et identifier des solutions d’adaptation. Contrairement aux deux autres espèces, des adultes de punaise marbrée ont été capturés en Montérégie et à Montréal depuis 2015. En considérant les besoins thermiques de la punaise marbrée, il apparaît que leur présence s’explique par l’introduction involontaire de spécimens par les voies de transport routier et de marchandise en provenance de régions plus au sud car cette espèce ne retrouvait pas les conditions nécessaires lors des dernières décennies pour compléter son cycle au Québec (Figure1).
Figure 1. Dates moyennes du pic d’apparition de la première génération d’adultes de la punaise marbrée basées sur la période 1981-2010.
En raison des hausses de températures projetées, ces trois insectes ont le potentiel de s’établir au Québec à l’horizon 2041-2070. Ils pourraient en effet compléter au moins un cycle de développement car la durée de chaque stade de développement serait raccourcie. C’est en Montérégie que ces trois espèces ont le plus de chances de s’établir dans le futur et, dans le cas de la punaise marbrée, son aire de distribution pourrait même s’étendre jusque dans la région de la Capitale-Nationale (Figure 2).
Figure 2. Dates moyennes du pic d'apparition de la première génération d'adultes de la punaise marbrée : scénario de changement supérieur (2041-2070).
Ainsi, la punaise marbrée pourrait compléter sa première génération et atteindre le stade adulte dès le mois de septembre, soit avant les premiers gels automnaux, d’autant plus que ces derniers seront retardés du fait de l’évolution du climat. Ces insectes pourraient donc devenir plus problématiques pour les producteurs agricoles du Québec.
Plusieurs solutions leur permettront de s’adapter pour lutter efficacement contre l’introduction et l’expansion de l’aire de répartition de certains insectes et maladies, qui résulteront des changements climatiques à venir.
Quelques exemples :
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La biosurveillance avec des réseaux et des méthodes de dépistage modernisés, incluant un meilleur réseautage et une meilleure surveillance de ce qui se passe dans les provinces canadiennes et états américains voisins, ou encore le recours à des outils de science citoyenne pour suivre l’évolution de l’aire de distribution des espèces exotiques envahissantes
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Développer une bonne connaissance de ces nouveaux phytoravageurs, autant au point de vue de leur biologie que des méthodes de lutte respectueuses de l’environnement (ex. pièges de capture de masse, filets d’exclusion, variétés résistantes) pour pouvoir réagir rapidement et ainsi limiter la progression de ravageurs et les dégâts aux cultures
Retombées pour l'adaptation
Retombées pour l'adaptation
Les connaissances issues de ce projet permettront le développement ou la révision d’outils de planification et d’action des décideurs en vue de favoriser l’adaptation du secteur de la phytoprotection aux changements climatiques.
Les clubs d’encadrement technique pourront également utiliser les résultats obtenus pour planifier l’adaptation progressive de leurs services aux producteurs en fonction des menaces identifiées.
Ce projet pourrait également avoir des répercussions sur les services offerts par le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) et le Laboratoire d’expertise et de diagnostic en phytoprotection (LEDP) du MAPAQ.
Publications scientifiques
Financeur(s)
Autres participants
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Agriculture et agroalimentaire Canada
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Ministère de l’agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation
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Université de Montréal
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Producteurs de grains du Québec