Labo Climat Montréal

L’adaptation aux changements climatiques dans les villes comporte des défis multiples. Ces défis sont parfois liés à l’incertitude quant aux changements et aux implications précises qu’ils auront sur les sites et territoires, selon leurs vulnérabilités propres.

Les processus entourant le réaménagement de secteurs urbains posent des enjeux particuliers pour l’adaptation. La Ville de Montréal et Ouranos, dans le cadre de leur partenariat, ont lancé un appel aux chercheurs pour la mise en place d’une démarche de recherche-action, inspirée de l’approche living lab, pour susciter des innovations dans ce domaine. Le secteur Lachine-Est a été choisi comme cas d’étude.

Documenter les pratiques et les enjeux vécus par les professionnels municipaux dans leurs interactions, entre eux et avec leurs partenaires relativement à l'intégration de l’adaptation aux changements climatiques dans un projet de développement urbain, pour ensuite expérimenter d'autres manières d’intégrer plus explicitement l’adaptation à leurs pratiques.

Cette expérimentation vise à faciliter la coordination des acteurs, l’identification d’expertise manquante et la clarification des choix d’adaptation aux changements climatiques.

• Compréhension des processus et des pratiques en cours, afin de pouvoir identifier les besoins et les enjeux que pose l’intégration plus explicite de l’adaptation: collecte de données via l’observation de rencontres de travail, analyse et synthèse de documents, entretiens individuels, analyse de réseau des professionnels impliqués, etc.

• Expérimentation du laboratoire vivant par la création d’une structure d’expérimentation flexible, la mise en relation d’acteurs qui ont peu l'habitude de collaborer.

• Utilisation de divers outils dont des ateliers et une plateforme de partage d'informations.

• Documentation du laboratoire vivant tout au long de la démarche.

La démarche de recherche-action menée pendant 18 mois a permis de dresser certains constats sur l’intégration de l’adaptation aux changements climatiques dans le processus d'élaboration et de mise en forme d'un projet urbain à Montréal. La mise en relation des acteurs au sein des ateliers a permis plusieurs collaborations interservices ainsi qu’une coordination entre la ville et les arrondissements qui va en s’accroissant avec le Bureau de projet partagé mis en place en mars 2020. Ces relations dépendent par contre de trois acteurs et font face à des contraintes liées au processus de projet urbain, ainsi qu’au cadre institutionnel et financier plus vaste. Le peu de relations avec les acteurs institutionnels externes, surtout en ce qui a trait au transport collectif, semble nuire à la prise en compte, en amont, de l’adaptation aux changements climatiques.

Sur le plan de l’expertise, une faible mobilisation des connaissances relatives à la prévention des îlots de chaleur dans la planification de Lachine-Est et une faible prise en compte des vulnérabilités sociales aux vagues de chaleur ont été constatés. Par contraste, l’expertise sur l’adaptation de la ville à l’augmentation de la fréquence et de l'intensité des événements de pluie extrême est bien présente et sollicitée dans la planification de Lachine-Est, bien que des améliorations soient de mise pour accroître la planification des co-bénéfices des interventions.

Les interventions sur ce thème sont aussi limitées par des enjeux de segmentation de la régulation des eaux pluviales entre le domaine public et le domaine privé, la gouvernance fragmentée des infrastructures vertes ainsi que le peu d’habitude à prendre en compte la topographie.

Finalement, les activités du Labo Climat ont aussi permis de documenter le fait que l’adaptation aux changements climatiques implique des choix et des arbitrages, autrement dit que les décisions quant aux mesures à prioriser ne sont ni neutres ni d’ordre uniquement technique, notamment lorsqu'il est question d'adaptation aux changements climatiques. Plusieurs acteurs du milieu lachinois souhaitent que le secteur Lachine-Est devienne un modèle d’écoquartier, tout en privilégiant une protection du patrimoine et un quartier inclusif.

Faire des choix et des arbitrages dans un tel contexte est indispensable, d'autant plus que les normes et critères particuliers définissant l’exemplarité de l’écoquartier, et les modalités de leur mise en oeuvre, restent encore à être précisés par les autorités publiques, en conversation avec la société civile et les promoteurs immobiliers.

Le Labo Climat émet quatre recommandations pour intégrer l’adaptation plus explicitement et formellement dans le processus balisé de projet urbain à la ville de Montréal. Tout d'abord, intégrer le climat dans l’évaluation collective de la pertinence du projet et de ses contraintes, à l’étape de justification. Ensuite, inclure le climat au moment de délibération sur différentes hypothèses d’aménagement. De plus, préciser la contribution des mesures d’encadrement du domaine privé en adaptation, notamment dans des modalités réglementaires annoncées au Programme particulier d’urbanisme. Finalement, s'assurer de la performance, de l’appropriation et de la résilience des infrastructures vertes.

Quatre autres recommandations du Labo Climat portent sur des défis à relever pour l’adaptation aux changements climatiques :

1. mettre en place une stratégie d’adaptation aux vagues de chaleur pour le réaménagement des friches industrielles et leurs abords; 

2. mobiliser les acteurs institutionnels externes pour  l’adaptation; 

3. pérenniser les collaborations interservices et les apprentissages dans la structure institutionnelle;

4. améliorer la gouvernance fragmentée des infrastructures vertes.