Quantifier et cartographier les impacts des changements climatiques sur la productivité des forêts de l’est du Canada
Les résultats de ce projet, notamment les simulations préliminaires et la théorie, soutiennent l’idée que l’aménagement forestier pourra accélérer la réponse des peuplements aux changements climatiques. En effet, l’ouverture du couvert forestier accélère la succession en modifiant les interactions de compétition au sein du peuplement.
Détails du projet
Responsable(s) scientifique(s)
Contexte
Les outils disponibles actuellement pour modéliser la réponse des forêts aux changements climatiques sont limités par l'absence d'intégration de processus écologiques fondamentaux.
D’un côté, les forestiers utilisent des courbes de croissance paramétrées pour différentes régions afin de prédire la productivité future. D’un autre côté, les gestionnaires de la biodiversité utilisent des modèles de distribution des espèces basées sur la relation actuelle entre la distribution et le climat.
Ces deux approches ne sont pas optimales pour projeter le rendement futur des forêts parce qu’elles ne considèrent pas l’interaction complexe entre l’aménagement forestier, la dynamique de migration des arbres et les interactions de compétition entre les différentes espèces. Il en résulte des projections manquant de réalisme qui ont une utilité limitée pour les aménagistes forestiers.
Ce projet vise à développer une suite intégrée d’outils qui permettront de quantifier la productivité des forêts à la transition entre les régions tempérées et boréales, là où les changements les plus importants sont susceptibles de survenir.
Objectif(s)
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Développer un ensemble de modèles de la dynamique forestière afin de mieux comprendre la distribution future de la forêt tempérée, ainsi que sa productivité, à la fin du siècle;
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Évaluer les impacts des changements climatiques sur les stratégies d’aménagement adoptées pour cet écosystème.
Démarche
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Développement de modèles de compétition pour les prédictions à court terme (10-25 ans) des impacts des changements climatiques sur la productivité;
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Développement de modèles de simulations de la dynamique forestière pour la prédiction des changements futurs de distribution des espèces et de la productivité à long terme (100-200 ans);
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Développement d’un modèle général de la productivité de l’écosystème forestier sous les changements climatiques;
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Développement d’applications pratiques de ces modèles et de stratégies d’aménagement forestier innovantes afin de diminuer les impacts appréhendés des changements climatiques sur la productivité de la forêt mixte tempérée.
Résultats
Une série de modèles de simulation à l'échelle de l'individu, du peuplement et du paysage forestier a été développée pour mieux comprendre les impacts combinés des changements climatiques et de l'aménagement forestier sur la migration de la forêt tempérée. Une nouvelle approche de modélisation des aires de répartition basée sur la dynamique des arbres et qui tient compte de la compétition et de la dispersion a été réalisée. Le projet a permis d’améliorer la compréhension de l'incertitude sur la productivité de différentes essences à la suite des changements climatiques. La source la plus importante d'incertitude vient non pas de la qualité des modèles écologiques (qui s’est avérée être excellente), mais plutôt de l'incertitude des scénarios de changements climatiques.
La cartographie des régions les plus sensibles aux changements climatiques a aussi été réalisée et a permis de voir que la capacité de réponse des forêts aux changements climatiques est minimale là où le changement le plus important est susceptible de se produire, soit à la limite actuelle de la forêt tempérée. En utilisant le scénario pessimiste RCP 8.5, les projections de la dynamique forestière montrent que la forêt tempérée ne migrera pas vers le nord au cours des 100 prochaines années, malgré un déplacement de plusieurs centaines de kilomètres des conditions climatiques favorables à sa présence (Fig. 1).
Figure 1: Distribution projetée de la forêt tempérée et mixte à partir du modèle de simulation pour le scénario RCP 8.5. Remarquons l’absence de progression de la forêt tempérée vers le nord et la diminution de la présence de forêt mixte.
Plus précisément, les quatre résultats suivants sont à mentionner, de par leur pertinence aux domaines de l’écologie des communautés, de la biogéographie et de l’écologie forestière:
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L’aire de répartition des arbres est déterminée par les processus régionaux de colonisation et d’extinction, pas par la démographie locale;
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La capacité de réponse des écosystèmes forestiers à un changement climatique est minimale à la transition entre les biomes, là où le plus de changements sont susceptibles d’intervenir;
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L’intégration multi-échelles est nécessaire afin de limiter la propagation de l’incertitude dans les projections de la dynamique forestière;
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Les interactions biotiques peuvent avoir un effet majeur sur la vitesse de migration et, par conséquent, il est plus important de comprendre la dynamique de transition à la suite d’un changement climatique, que l’état d’équilibre.
Finalement, la caractérisation de la perception des enjeux forestiers au Canada a été réalisée grâce à un sondage auprès des intervenants de l'ensemble du pays. Les résultats ont révélé un besoin majeur de réaliser une analyse stratégique des impacts conjoints de l'aménagement forestier et des changements climatiques. Le sondage révèle également que, même si tous les acteurs du milieu forestier sont sensibles aux changements climatiques, ils ne disposent ou ne connaissent pas les outils nécessaires à l'adaptation.
Retombées pour l'adaptation
Les résultats de simulations préliminaires et la théorie soutiennent l’idée que l’aménagement forestier pourra accélérer la réponse des peuplements aux changements climatiques. L’ouverture du couvert forestier accélère la succession en modifiant les interactions de compétition au sein du peuplement.
Une planification judicieuse des interventions de récolte serait un moyen d’adaptation cohérent avec les préoccupations de l’industrie forestière sachant que les écosystèmes forestiers possèdent une faible probabilité de changement de composition à la limite sud de la forêt boréale de conifères en l’absence de perturbations naturelles ou de récolte forestière.
Publications scientifiques
Financeur(s)
Autres participants
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Cary Institute of Ecosystem Studies
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CNRS
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Conférence régionale des élus Bas-St-Laurent
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Conservation de la nature Canada
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Domtar
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Ministère des Ressources naturelles de l’Ontario
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Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs
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Produits Forestiers Résolu
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Service Canadien des Forêts, Ressources Naturelles Canada
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Université du Québec à Montréal
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Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue
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Université du Québec en Outaouais
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Washington State University