Recherche participative d'alternatives durables pour la gestion de l’eau en milieu agricole dans un contexte de changement climatique
Les projets RADEAU 1 et 2 ont notamment permis d'alimenter le gouvernement et les acteurs régionaux en matière de gestion de l'eau en valorisant et structurant des données existantes pour catégoriser le bilan hydrique de certaines régions en climats actuel et futur. Ils proposent également des recommandations pour l'élaboration de stratégies d’intervention afin d'atténuer ou d'éviter des conflits d’usage de l’eau à l’échelle du Québec agricole.
Détails du projet
Responsable(s) scientifique(s)
Contexte
Il est attendu que les changements climatiques auront des répercussions majeures sur la disponibilité en eau pour différents usages au Québec, dont le secteur agricole. Par conséquent, il apparaît important de collaborer avec les différents usagers et les acteurs locaux qui cohabitent sur un même territoire pour se partager les ressources eau pour différents besoins (agricoles, résidentiels et industriels).
Une approche collective et concertée permet d’identifier les risques de conflits en lien avec les changements climatiques et d’analyser des stratégies d'adaptation appropriées.
Objectif(s)
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Soutenir l’acquisition, la synthèse et le partage de connaissances sur la situation actuelle et future en termes de consommation et de disponibilité de l’eau dans onze régions agricoles: Montérégie, Estrie, Chaudière-Appalaches, Lanaudière, Centre-du-Québec pour le projet RADEAU 1 et Capitale-Nationale, Bas St-Laurent, Outaouais, Laurentides, Laval et Mauricie pour le projet RADEAU 2.
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Évaluer la capacité d’adaptation des entreprises agricoles pour faire face aux conflits d’approvisionnement dans les territoires ciblés.
Démarche
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Réalisation du projet sur la base d’une démarche participative impliquant les acteurs des territoires agricoles concernés, alimentée par des connaissances issues de travaux de recherche appliqués en hydrologie;
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Production de bilans régionaux mettant en relation la disponibilité et les besoins en eau des différents secteurs d'activité (agricole, industriel, domestique/urbain) en climat actuel et à l'horizon 2050 (valorisation de données disponibles et modélisation des besoins en eau des cultures);
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Analyse plus fine de certains territoires vulnérables ciblés grâce au développement d'un méta-modèle de la disponibilité et des besoins en eau;
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Identification de pistes d'adaptation existantes et potentielles au travers de consultations avec des experts et une revue de la littérature;
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Évaluation de modes de gestion individuelle et collective permettant d’éviter les conflits d’usage dans des territoires (approche participative avec les acteurs locaux et évaluation de l'efficacité de certaines actions avec le méta-modèle développé à l'étape précédente).
Résultats
Dans les 11 régions étudiées, le portrait général de la disponibilité et des besoins en eau des différents usagers en climats actuel et futur (Figure 1) a mis en évidence un certain nombre d’observations.
Actuellement, les sources d’eau dominantes actuelles pour combler les besoins agricoles varient d’une région à l’autre. Par exemple, l’eau souterraine représente 93% et 90% des usages agricoles hors-piscicoles en Outaouais et au Bas-St-Laurent respectivement et seulement, 30% à Laval et 40% dans la Capitale-Nationale.
Si dans certaines régions étudiées, les usages agricoles représentent une part relativement importante des prélèvement totaux (par ex. 34% dans le Centre-du-Québec, 26% en Chaudière-Appalaches, 24% dans le Bas St-Laurent et 14% en Mauricie), ils ne représentent que 1 % à 6% des prélèvements totaux dans d’autres régions. Le secteur agricole doit donc certainement être mis à contribution dans l’effort d’un usage plus responsable de l’eau, mais ce n’est pas nécessairement le secteur qui exerce le plus de pression sur la ressource. C’est souvent le facteur démographique qui est décisif.
Les conflits d’usage observés dans le passé ont surtout concerné les usages résidentiels et ICI (Institutionnel, Commercial et Industriel). Cependant, il semblerait que les conflits entre le secteur résidentiel et agricole, pour un usage d’eau potable, soient plus fréquents.
La pratique de l’irrigation est croissante depuis la dernière décennie, et les programmes de salubrité tels que Canada GAP imposent des critères élevés de qualité de l’eau d’irrigation aux producteurs maraîchers. Ainsi, les eaux souterraines sont particulièrement exploitées par rapport à la ressource disponible en Montérégie-Ouest où les besoins en eau des usagers résidentiels et industriels y sont importants et croissants, et côtoient un bassin de producteurs maraîchers dont les prélèvements pour l’irrigation des cultures sont significatifs.
Les bassins versants de la rivière L’Assomption et de la rivière Mascouche dans Lanaudière sont d’autres exemples où les prélèvements pour les usages résidentiels, ICI et agricole mettent de la pression sur la ressource en eau de surface.
Figure 1. Projection cartographique de la région des Laurentides qui montre l’utilisation actuelle de l’eau de surface par rapport au débit d’étiage estival. Les indices de pression mettent en relief la vulnérabilité de secteurs au sud de la région, en périphérie de la rivière des Milles-Îles et de d’autres cours d’eau mineurs, où le seuil critique de 15 % est dépassé.
Par ailleurs, quatre études de cas ont été réalisées sur de plus petits territoires : le complexe tourbeux de Lanoraie dans Lanaudière où plus de 3000 ha de pomme de terre, irrigués avec de l’eau provenant des aquifères de surface, sont vulnérables si le niveau de la nappe continue à baisser, le ruisseau Rousse dans les Laurentides où les eaux de surfaces pourront difficilement subvenir aux besoins des producteurs agricoles pour l’irrigation des cultures en climat futur ou encore, la MRC de Portneuf et Saint-Rémi en Montérégie.
Ces études de cas ont montré l’importance de baser la prise de décision sur la collecte et l’analyse de données sur les besoins et les ressources en eau à des échelles suffisamment fines.
S’il peut être pertinent dans certaines situations d’analyser l’option de sources d’eau alternatives ou de solutions de gestion collective de l’eau pour sécuriser l’accès à la ressource, l’étude a surtout permis de constater qu’il y a place à amélioration dans l’efficacité d’utilisation de l’eau en agriculture (optimisation des équipements et de la régie d’irrigation) et des pratiques et des systèmes culturaux (par ex. choix optimal de cultivar de fraises et de pommes de terre)
Retombées pour l'adaptation
Retombées pour l'adaptation
Valoriser et structurer de nombreuses données existantes et en développer de nouvelles (par ex. des chartes de consommation d’eau pour les principales productions végétales et animales au Québec) pour caractériser le bilan hydrique des régions étudiées en climats actuel et futur et ainsi alimenter le gouvernement, les acteurs régionaux ou d’autres études en matière de gestion de l’eau ;
Proposer des recommandations pour élaborer des stratégies d’intervention pour atténuer ou éviter des conflits d’usage de l’eau à l’échelle du Québec agricole (par ex. renforcer les connaissances des producteurs et intervenants agricoles en matière de réglementation entourant la gestion de l’eau) ou à l’échelle des études de cas ciblées.
Publications scientifiques
Financeur(s)
La contribution d’Ouranos dans ce projet est sous forme d’expertise
Ce projet est réalisé en vertu du sous-volet 3.2 du programme Prime-Vert 2013-2018 et il a bénéficié d’une aide financière du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) et du Plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques (PACC 2013-2020)
Autres participants
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Sylvestre Delmotte, consultant
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Institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA)
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Université Laval
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Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC)
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Direction de l’expertise hydrique (DEH)
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INRS-ÉTÉ