Du 30 novembre au 12 décembre dernier, quelque 85 000 représentants du monde entier se sont réunis à Dubaï à l’occasion de la 28e Conférence des Parties sur les changements climatiques (COP28). L’heure était aux négociations sur le renforcement de l’ambition et l’accélération de la mise en œuvre de l’action climatique mondiale.
Même si la publication du premier bilan mondial a capté l’essentiel de l’attention dans les discussions, les Parties ont également signé un accord de dernière minute sur la création d’un cadre pour l’Objectif mondial d’adaptation. Cet accord trace la voie à suivre pour renforcer la résilience face aux changements climatiques dans un climat changeant.
L’objectif mondial d’adaptation
Après 2 années de discussions préalables et 8 ateliers techniques dédiés à définir l’Objectif mondial d’adaptation (GGA) issu de l’Accord de Paris, les Parties ont convenu de ses objectifs visant à renforcer la capacité d’adaptation, accroître la résilience et réduire la vulnérabilité aux changements climatiques à l’échelle mondiale. Contrairement à l’atténuation, dont les progrès peuvent être suivis à l'aide de la mesure du 1,5°C, l'adaptation nécessite une approche plus complexe, notamment en raison de son caractère local.
Malgré des divergences d’opinions, notamment sur le financement, les cibles et les objectifs pour guider les efforts multilatéraux, les Parties ont élaboré un premier texte de décision, représentant un premier pas pour définir la voie vers la résilience mondiale aux changements climatiques. Bien qu’imparfait, ce texte reflète un consensus mondial sur les objectifs d’adaptation, la nécessité d’un soutien financier et technologique et le renforcement des capacités.
D'ici 2030, l'Objectif mondial d’adaptation vise, entre-autres, à ce que les pays effectuent des analyses actualisées des risques climatiques, mettent en place des plans nationaux d'adaptation, progressent dans leur mise en œuvre, et établissent un système de suivi, d'évaluation et d'apprentissage pour leurs efforts nationaux d'adaptation.
Consultez l’objectif mondial d’adaptation (en anglais)
Des initiatives en faveur de l’adaptation : D’Adaptation Futures 2023 à la COP28
Les appels à un plus grand soutien à l'adaptation au climat ont été le point central d'une série d'événements avant et pendant la COP28. C’est le cas notamment de l’événement parallèle Making Headway for Adaptation, codirigé par l’organisation danoise DanChurchAid et Ouranos, pendant lequel le directeur général du consortium, Alain Bourque, a partagé les leçons apprises lors de la conférence Adaptation Futures, qui s’est tenue à Montréal en octobre dernier. Il a promu notamment la collaboration et l’intégration des connaissances autochtones et locales, dans la recherche, les politiques et les solutions d’adaptation, tout en insistant sur l'inclusion des voix marginalisées du Sud pour promouvoir la justice climatique, l'équité et la diversité.
Alain Bourque a pu également insister sur l’urgence de traiter du financement et des investissements en adaptation.
Le sous-financement climatique en adaptation
Le financement du climat a occupé une part importante des discussions lors de la COP28. Plusieurs pays, particulièrement les plus vulnérables, ont exprimé leur inquiétude concernant le sous-financement mondial de l'adaptation aux changements climatiques. Cela fait écho au récent rapport du PNUE, qui indique une baisse de 15% des financements multilatéraux et bilatéraux en adaptation pour les pays en développement en 2021, totalisant 21 milliards de dollars. Ceux-ci sont bien en deçà des besoins estimés à 215 milliards de dollars par an d'ici 2030.
Bien que des promesses de financement de 188 millions de dollars aient été faites à la COP28, beaucoup estiment ce montant est largement insuffisant compte tenu de l'urgence climatique. Plusieurs pays en développement ont plaidé pour un financement de l'adaptation d'au moins 100 milliards de dollars par an, soulignant l'injustice de faire face aux perturbations climatiques auxquelles ils ont peu contribué.
En effet, il est crucial que le financement climatique international englobe à la fois l'atténuation, l'adaptation et les pertes et dommages pour garantir une lutte efficace contre les changements climatiques. Rappelons que pour 1$ investi en prévention avec des mesures d’adaptation, on économise entre 10$ et 15$ déboursés en réaction à une catastrophe.
Le fonds pour les pertes et dommages : une avancée majeure, mais insuffisante
L'annonce de la création et de l'opérationnalisation d’un fonds dédié aux pertes et dommages à l'ouverture de la COP28 a également suscité des inquiétudes quant à une possible diminution des fonds alloués à l'adaptation. Bien que cette initiative marque un premier pas majeur de la communauté internationale dans le financement des pertes et dommages, les 700 millions de dollars promis jusqu’à présent par les pays riches, principalement responsables de l'urgence climatique, représentent moins de 0,2% des besoins annuels des pays vulnérables, évalués entre 100 et 580 milliards de dollars. Le gouvernement canadien s'est engagé à verser 16 millions de dollars dans ce fonds, une somme critiquée comme insuffisante compte tenu de son rôle de grand pollueur.
Défis et perspectives
Bien que les négociations à la COP avancent à petits pas, il est encourageant de constater que ces conférences stimulent le dialogue. Certains obstacles persistent, tels que le financement insuffisant et les divergences d'opinions entre les Parties en faveur de leur propre intérêt, mais ces défis ne doivent pas décourager notre engagement.
À la COP28, un appel fort a été lancé aux pays pour concrétiser leurs engagements par des actions tangibles et intensifier leurs efforts, tant dans l’atténuation qu’en adaptation. Bien que l'adaptation ait été reléguée au second plan, cette COP a montré que les discussions, même lentes, peuvent aboutir à des résultats concrets. La collaboration est la clé pour progresser et adapter nos modes de vie aux conséquences des changements climatiques déjà présentes.
La COP29 et la COP30 qui se tiendront en Azerbaïdjan et au Brésil, en 2024 et 2025, offrent une opportunité pour des négociations audacieuses pour relever l’ambition et agir collectivement face à l’urgence climatique. D’ici là, au Québec, divers acteurs locaux de tous les secteurs s’engagent activement pour mettre en place des mesures d’adaptation variées et concrètes pour se préparer contre les conséquences des changements climatiques. En travaillant ensemble, nous pouvons faire avancer la cause de manière proactive et constructive.