En montagnes russes du début à la fin, 2021 nous en aura fait voir de toutes les couleurs. Au cours de ces 12 derniers mois, la pandémie a certes marqué l’actualité, mais les changements climatiques ont également eu leur lot de couverture médiatique. En effet, les observations sur le terrain, tout comme les données scientifiques rapportées, nous démontrent plus que jamais la réalité des changements climatiques et des impacts qu’ils engendrent. L’année qui vient de se terminer aura donc été marquée par des phénomènes climatiques extrêmes, plus généralisés, plus intenses et plus fréquents partout sur la planète.
Malgré la présence du phénomène de la Niña, qui refroidit la température moyenne du globe de façon cyclique, l’année 2021 aura tout même été parmi les plus chaudes jamais enregistrée selon l’Agence nationale d’observation océanique et atmosphérique (NOAA), se situant au 5e, 6e ou 7e rang selon les différentes sources de données. Même si les événements climatiques extrêmes découlant de ce réchauffement ont été moins marqués au Québec qu’ailleurs au Canada, il n’en reste pas moins que la province a été l’endroit où les anomalies de température furent les plus importantes, ce qui affecte directement l’équilibre de nos écosystèmes, la disponibilité en eau et la santé de nos populations.
Il faut donc prendre le bilan 2021 comme un rappel à rester vigilant, à mettre en œuvre les actions pour atteindre la carboneutralité rapidement et à planifier adéquatement les solutions d’adaptation et de réduction des risques pour gérer les impacts inévitables et de plus en plus concrets des changements climatiques.
Événements climatiques marquants
Selon la NOAA, juillet 2021 a été le mois le plus chaud jamais enregistré sur la planète. Partout dans le monde, les populations ont été affectées par des événements extrêmes, que ce soient les inondations en Europe et en Asie ou les sécheresses et les canicules qui ont touché la plupart des régions du globe, jusqu’aux récentes tornades dans le sud des États-Unis ou la saison des ouragans particulièrement active.
Au Canada, cette chaleur excessive s’est spécialement fait sentir dans l’Ouest du pays. Rappelons que le village de Lytton en Colombie-Britannique a battu le record de température canadien quand le mercure a atteint 49,6 °C en juin dernier avant d’être rasé par les flammes quelques jours plus tard. Ce malheureux record s’ajoute aux nombreux événements climatiques qui se sont abattus sur l’Ouest canadien qui fut aux prises également avec des périodes intenses de sécheresse, des feux de forêt et des rivières atmosphériques entrainant d’importantes inondations.
Suite à ces phénomènes extrêmes, force est donc de constater que les impacts cumulatifs des changements climatiques sont bien réels. L’effet de cascades est visible : la hausse des températures augmente le niveau de sécheresse qui contribue aux feux de forêt qui, une fois décimée, ne peut intercepter l’eau de pluie qui s’écoule vers les vallées augmentant la rapidité des inondations.
Publications scientifiques d’intérêt
Pour l’année 2021, nous retenons trois publications importantes qui couvrent chacun l’international, le national et le régional.
Au plan international, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) publiait en août dernier son rapport soulignant que, malgré les efforts de réduction des gaz à effet de serre (GES) pour stabiliser et limiter les changements climatiques, les températures continueront d’augmenter au moins jusqu’en 2050. Un réchauffement de 1,5 ou de 2 degrés sera dépasser au courant du 21e siècle, à moins que des efforts très importants de réductions se mettent en place dans les prochaines décennies. De nombreux changements dus aux émissions passées et futures de gaz à effet de serre sont irréversibles pendant des siècles, voire des millénaires, en particulier les changements dans les océans, les calottes glaciaires et le niveau global des mers.
Il est donc inévitable que ces impacts liés aux changements climatiques aillent en s’amplifiant. Le rapport du groupe de travail n.2 sur les solutions d’adaptation envisagées pour contrer ces impacts est attendu le 21 février 2022.
Au plan national, le rapport sur les changements climatiques, dirigé par Ressources naturelles Canada, synthétise les dernières données scientifiques sur l’impact des changements climatiques, notamment en ce qui a trait aux communautés, l’environnement et l’économie. Les différentes sections explorent notamment les principales vulnérabilités du pays, les risques et les défis spécifiques auxquels nous sommes confrontés, les connaissances et les perspectives autochtones et les approches nouvelles et innovantes en matière d’adaptation. Le chapitre sur le Québec devrait être publié en 2022.
En novembre dernier, le Comité consultatif sur les changements climatiques a rendu public son avis transmis au ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques sur la carboneutralité et la nécessité de s’adapter. Se basant sur l’état des connaissances actuel, le Comité recommande notamment un meilleur suivi de la trajectoire du Québec vers la carboneutralité, un renforcement de l’action climatique et un renforcement du leadership du Québec et de la mobilisation de la population.
COP26: un événement attendu
Suite aux données publiées dans le rapport du GIEC, la population attendait avec impatience la 26e session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP26). À cette occasion, les décideurs de partout dans le monde se sont réunis pour négocier et générer des ententes communes sur les stratégies à adopter pour maintenir le réchauffement de la planète à 1,5 degré au-dessus de la moyenne préindustrielle.
Présent à l’événement, Ouranos a profité du forum pour mettre de l’avant les enjeux québécois et l’expertise du consortium lors de discussions avec des acteurs clés, tant au niveau national qu’international. Ces rencontres ont également permis d’inscrire davantage l’adaptation au cœur des échanges sur la lutte contre les changements climatiques.
2022: anticiper les impacts et les risques
Il est indéniable que les événements survenus en Colombie-Britannique ont frappé l’imaginaire collectif. Devant ces impacts de plus en plus concrets et visibles des changements climatiques, il est évident qu’il y a urgence de s’adapter, car bien que la carboneutralité permettra de stabiliser le climat, l’accumulation de GES se poursuit et la société doit se préparer dès maintenant et prendre action.
Le Québec ne doit pas se laisser berner par un bilan d’année sans phénomène climatique majeur. Il est fort probable que, dans les prochaines années, des événements extrêmes similaires surviennent également chez nous avec des impacts tout aussi considérables : inondations, tempêtes violentes, canicules, etc. À nous de mettre en œuvre des solutions d’adaptation rapidement.
C’est dans cette perspective que la mission d’Ouranos s’est poursuivie au cours des 12 derniers mois. Avec la fin de plusieurs projets de recherche et le démarrage d’un nouveau cycle incluant une toute nouvelle programmation, le consortium a toujours à cœur de collaborer avec ses nombreux partenaires pour mettre de l’avant la science et les solutions d’adaptation afin que la société puisse construire de façon plus robuste ses infrastructures, verdir ses villes, réduire la pression sur ses écosystèmes, mieux gérer ses ressources en eau, mieux aménager son territoire, etc.
Quelques projets de recherche :
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Intégration des changements climatiques dans l’évaluation de la valeur des actifs hydroélectriques
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Plateforme pour l’analyse avantages-coûts en érosion et submersion (PANACÉES)
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Pérennisation des pratiques agro-environnementales et des aménagements agroforestiers linéaires
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etc.
Naturellement, les impacts anticipés au Québec varieront beaucoup en fonction des stratégies d’adaptation et de résilience qu’adopteront les différentes régions, qu’elles soient côtières, agricoles, nordiques ou urbanisées. Car bien que l’innovation technologique soit cruciale, les changements ne pourront avoir lieu sans des innovations sociales profondes qui se traduiront par un changement de comportement dans le transport, dans la consommation ou dans l’adoption de nouvelles technologies.
Tout comme on entend qu’il faut apprendre à vivre avec le COVID-19, il faut aussi apprendre à vivre avec les changements climatiques, mais non sans agir rapidement sur deux fronts : réduire drastiquement nos émissions de GES et mettre en place des solutions d’adaptation. L’un ne peut aller sans l’autre, pour le bien de la population et de notre territoire.