Pêches et aquaculture commerciale
En raison des changements climatiques, le vaste réseau hydrographique du Québec, composé de milliers de lacs et de rivières ainsi que du fleuve et du golfe du Saint-Laurent, subit des changements, à commencer par une hausse de la température de l’eau de surface. On observe également des modifications aux régimes de précipitations, une diminution du couvert de glace, une hausse du niveau relatif de la mer, un déclin de l’oxygène dissous au large des côtes canadiennes ainsi qu’une acidification de certaines eaux. Ces tendances sont appelées à se poursuivre dans le futur et influenceront les comportements, la distribution, le métabolisme des espèces pêchées ainsi que leur taux de survie et de reproduction, en plus d’avoir des conséquences sur les infrastructures et la sécurité en mer.
Modifications des ressources
Les revenus de l’industrie de la pêche et de l’aquaculture dépendent principalement du volume et de la valeur de la ressource. Des modifications tant sur le volume que sur la valeur sont à prévoir en raison des répercussions des changements climatiques sur la distribution, la physiologie, la croissance, le taux de survie ou encore la reproduction de certaines espèces et conséquemment sur la dynamique et la composition des populations. Les coûts des sorties en mer pourraient être plus importants pour rechercher les espèces à valeur marchande élevée qui se trouvent plus loin des côtes ou vers des eaux plus profondes. Par ailleurs, certaines régions pourraient voir l’apparition d’espèces à haute valeur commerciale ou à moindre valeur en raison d’un changement dans leur aire de répartition.
Par exemple, la crevette nordique , espèce d’importance économique au Québec, est particulièrement sensible aux conditions combinées d’augmentation de température et de diminution du pH et de la quantité d’oxygène dissous dans l’eau. Il est projeté que la crevette nordique se raréfiera à proximité de la limite sud de son aire de répartition actuelle avec une diminution de l’abondance, du potentiel de capture et un déplacement de son aire de distribution vers le nord. La modélisation suggère également une diminution de la taille de cette espèce sur toute son aire de distribution.
Vulnérabilité des populations de crevette nordique aux changements climatiques et globaux le long de la côte est du Canada - de la ressource naturelle aux communautés côtières
Grâce à ce projet, les principaux acteurs des pêcheries seront sensibilisés aux effets attendus des changements océaniques globaux sur les populations de crevette nordique et sur la pêche. Sur la base de connaissances nouvelles et robustes ils seront en mesurent d'identifier des solutions durables permettant de s'adapter à ces impacts, tout en préservant cette ressource à forte valeur économique, culturelle et sociale.
Avec le réchauffement des températures, certaines espèces comme les salmonidés, qui sont plus adaptés aux eaux froides, verront leur habitat thermique préférentiel diminuer, autant dans les lacs nordiques qu’en rivières, ce qui aurait des impacts sur la pêche sportive, la pêche de subsistance et même la pisciculture. C’est le cas notamment de l’omble de fontaine qui, en raison du réchauffement des températures moyennes lors de la maturation sexuelle et de l’incubation en pisciculture, subit des décalages de période de reproduction, mettant à risque le maintien de cette ressource majeure pour la pisciculture et la pêche récréative au Québec.
Production d’omble de fontaine adaptée aux changements climatiques: évaluation de l’importance des effets épigénétiques
Ce projet de recherche fournira des connaissances indispensables pour mieux adapter les stratégies de production et de gestion afin d’assurer la pérennité de l’importante industrie aquicole et récréo-touristique supportée par l’omble de fontaine.
Par ailleurs, la hausse des températures de l’eau pourrait favoriser l’émergence d’espèces exotiques envahissantes et de pathogènes représentant un risque pour les espèces exploitées et éventuellement pour la santé humaine. Par exemple, Vibrio vulnificus et Vibrio parahaemolyticus sont des zoonoses associées à la consommation de produits de la mer. Ces bactéries sont très sensibles à la température, ainsi, les hausses anticipées de température au cours des décennies à venir pourraient avoir un impact positif sur leur prolifération. La récolte de mollusques demeure une activité récréative et commerciale importante au Québec. Or, les zones de récolte (Côte Nord, Gaspésie, Bas-Saint-Laurent, Île-du-Prince-Édouard) pourraient être plus à risque, en fonction des modifications des températures de l’eau dans ces zones.
Modélisation de scénarios futurs de température de l’eau en milieu côtier et implications sur les infections potentielles par vibrio parahaemolyticus et vibrio vulnificus
Les projections issues du projet permettent d’identifier les risques plausibles et de protéger la santé humaine et l’industrie de la conchyliculture dans l’estuaire et le Golfe du Saint Laurent.
Altération des infrastructures et à la sécurité des activités
Outre les impacts liés à la réponse biologique des espèces aux changements climatiques, d’autres impacts sur l’industrie de la pêche et de l’aquaculture peuvent également être causés par des événements extrêmes. Les changements projetés dans le régime des tempêtes et des vagues contribueront à accroître le risque pour les infrastructures, en plus de réduire la sécurité en mer surtout pour les petites embarcations de pêche. Les revenus pourraient également être affectés par une réduction des jours d’opération en raison des conditions météo défavorables. Des épisodes de pluie plus fréquente et plus intense pourraient accroître la vulnérabilité de certaines installations liées à l’aquaculture en eau douce en raison d’inondations localisées et des épisodes de surverses.
Bouleversement du mode de vie et du développement de certaines communautés
Les régions maritimes, la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, la Côte-Nord, le Bas-Saint-Laurent et le Nunavik seront particulièrement affectées puisque leur économie et le mode de vie de leurs communautés reposent en grande partie sur cette industrie. Par exemple, pour le nord du Québec où les changements climatiques sont plus rapides que dans le sud, la perte de certains des habitats préférentiels des poissons traditionnellement pêchés par les communautés nordiques entraineront des bouleversements dans leur mode de vie. Dans certaines communautés, l’effondrement des stocks ou le déplacement de certaines espèces pourrait affecter les opportunités d’emplois dans l’industrie et contribuer à dévitaliser des communautés déjà fragilisées.